Licenciement au retour du congé maternité : abusif ?

Quel risque court l’employeur qui résilie Le contrat de travail d’une collaboratrice au retour d’un congé maternité ?

Rappel

  • La collaboratrice ne peut être occupée dans les 8 semaines qui suivent l’accouchement.
  • La collaboratrice ne peut être occupée que si elle y consent entre la 9ème et la 16ème
  • La collaboratrice à temps partiel et à temps plein a droit à un congé maternité de 14 semaines.
  • La collaboratrice est protégée contre le licenciement pendant la grossesse et les 16 semaines qui suivent l’accouchement.

La loi fédérale sur l’égalité (LEg)

Aux termes de la loi fédérale sur l’égalité :

  • il est interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe. Le licenciement notifié à une travailleuse parce qu’elle est enceinte, souhaite le devenir ou est devenue mère constitue une discrimination ;
  • l’existence d’une discrimination à raison du sexe est présumée pour autant que la personne qui s’en prévaut la rende vraisemblable. Dès lors, il appartient à l’employeur d’apporter la preuve stricte qu’elle n’existe pas, (renversement du fardeau de la preuve). Attention, il est difficile d’apporter la preuve de faits négatifs, soit, en l’espèce, que l’employée aurait été licenciée même si elle n’avait pas été enceinte.

Les faits

B. est entrée au service de A. SA en avril 2006 en qualité d’assistante du service technique ; elle a occupé diverses fonctions au sein de l’entreprise, notamment celle d’assistante de direction; elle a été nommée responsable du groupe communication et événementiel dès le 18 septembre 2015.

En octobre 2015, B. a informé son supérieur qu’elle était enceinte depuis août 2015. Elle a accouché le 29 avril 2016.

Au printemps 2016, A. SA a lancé le processus de recrutement d’un nouveau responsable communication.

A l’issue de son congé maternité prolongé de quatre semaines de vacances, B. a repris le travail le 19 septembre 2016. Le jour même, elle s’est vu notifier son licenciement avec effet au 31 janvier 2017, terme qui sera finalement reporté au 28 février 2017.

A. SA a motivé le congé par le fait que l’employée n’avait pas été assez performante comme responsable du groupe communication, ajoutant qu’elle n’avait pas «les épaules assez larges» pour occuper ce poste.

Le Tribunal Fédéral (TF)

Le TF a récemment rendu une décision de laquelle on peut tirer certains enseignements :

  • un licenciement notifié dès le retour de congé maternité constitue un indice dans le sens d’une discrimination.
  • en raison du renversement du fardeau de la preuve, l’employeur devait prouver qu’il disposait d’un motif objectif pour résilier le contrat de travail soit, en l’espèce, des qualités insuffisantes de la collaboratrice pour le poste.
  • il appartient à l’employeur de prouver que la grossesse ou la maternité n’a pas été un facteur déterminant dans sa décision de mettre un terme au contrat et, en d’autres termes, que l’employée aurait été licenciée même si elle n’avait pas été enceinte.

Le jugement

L’employeur n’a pas été à même de prouver que cette collaboratrice aurait été licenciée si elle n’avait pas été enceinte.

L’employeur a été condamné à verser à la collaboratrice une indemnité pour licenciement abusif et discriminatoire de CHF 21’303.75 équivalent à trois mois de salaire.

Enseignement

L’employeur qui veut résilier le contrat de travail d’une collaboratrice au retour de son congé maternité analysera scrupuleusement le dossier et sera bien inspiré de consulter un mandataire s’il entend limiter ses risques.

 

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